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  • Pas de vagues de Teddy Lussi-Modeste.

    Pas de vagues de Teddy Lussi-Modeste.
     
    Un très mauvais film révélateur de l'état catastrophique du cinéma Français.
     
    Julien Keller est un jeune professeur naïf bienveillant, inexpérimenté et homosexuel (le film insiste lourdement sur ce fait). Il enseigne le Français en quatrième au collège Paul Eluard interprétant avec ses élèves, de manière fort maladroite, un poème célèbre de Ronsard, Mignonne, allons voir si la rose.
    S'ensuit des accusations de séduction de sa part par une élève Leslie. Très vite son frère, Steve, jeune voyou déluré menace le professeur. Ses collègues le défendent mais le proviseur donne le La: Pas de vagues!
     
    La presse quasi unanime défend ce film assez ignominieux qui renverse toutes les valeurs et nous mène en bateau. Pas de hussards noirs. Pas de laïcité en danger. Pas de réel pédagogique ni sociologique. Juste un film extrêmement bien pensant qui renverse (au nom de l'adaptation d'une histoire vraie ce qui n'est jamais le garant du réel ni de la justesse de ton d'une œuvre de cinéma) le réel contemporain de l'école (celle de Samuel Paty et Dominique Bernard) pour nous montrer le comportement inqualifiable de petites et petits blancs de la France périphérique et des quartiers en souffrance.
    Nous sommes à des années lumières de l'école des hussards de la république celle de monsieur Germain, l'instituteur d'Albert Camus. Nous sommes ici dans une école de la bienveillance cinématographique, de la fiction sur-scénarisée. Dans l'école du professeur François Bégaudeau, l'enseignant idéologue du film de Laurent Cantet Entre les murs. Sans aucun doute avec ce film sans réel vague, le cinéaste pourra rejoindre la grande famille progressiste du cinéma français. Un mauvais film lourd à la mise en scène pesante et peu inspirée.
     
    Jacques Déniel
     
    Pas de vagues un film de Teddy Lussi-Modeste
    France - 2023 - 1h32
    François Civil, Shaïn Boumedine, Bakary Kebe....
     

  • Amal, un esprit libre" de Jawad Rhalib.

    Amal, un esprit libre" de Jawad Rhalib.
     
    "Amal un esprit libre" est un grand film politique sincère, courageux et d'une grande justesse de ton. Superbement mis en scène par Jawad Rhalib dont les cadres ciselés, les mouvements de caméra précis et la direction d'acteurs tous excellents, tout particulièrement l'impressionnante Lubna Azabal qui joue le rôle de l'enseignante passionnée.
     
    Bruxelles, un lycée public en 2023. Face à l'étroitesse d'esprit de ces élèves immigrés pour la plupart qui ont pris à partie Monia une élève désignée arbitrairement comme sale lesbienne. Amal veut transmettre à ses élèves, dont certains radicalisés par le biais de l'enseignant de religion du lycée (1) Nabil, un belge converti et fanatique impeccablement campé par Fabrizio Rongione, la beauté de la poésie, l'indépendance d'esprit et de pensée en étudiant Victor Hugo et en leur faisant lire les beaux poèmes d'Abû Nuwas, poète croyant de langue arabe du califat abasside (2) qui à travers ses textes chante le goût des beaux garçons, du libertinage, du vin et de la liberté ce qui est insupportable pour tous les fanatisés d'Allah.
     
    Tout cela va très mal se terminé au pays des frites, de la bière et du cyclisme, le pays de Magritte, de Brel, d'Adamo... L'affaire est grave terrifiante, insoutenable. Il est grand "de dire ce que l'on voit et surtout de voir ce que l'on voit" comme le disait Charles Péguy.
    Un film magnifique, tragique et crucial. A voir absolument!
     
    Jacques Déniel
     
    (1) Les cours de religion sont obligatoires dans les écoles publiques belges. Il serait question de les rendre facultatifs à la rentrée 2024.)
    (2) califat sunnite qui gouverne une large partie du monde musulman de 750 à 1258.
     
    Amal, un esprit libre" de Jawad Rhalib
    Belgique - 2023 - 1h51
    Interprétation:  Lubna Azabal, Fabrizio Rongione, Catherine Salée, Kenza Benbouchta, Ethelle Gonzalez-Lardued, Johan Heldenberg, Babetida Sadjo, Mehdy Khachachi 
     

  • Une vie cachée de Terrence Malick

    Une vie cachée de Terrence Malick

    Le chemin de sainteté

    Même si j'écris avec les mains enchaînées, cela vaut mieux que d'avoir ma volonté enchaînée. Parfois, Dieu se manifeste en donnant sa force à ceux qui l'aiment et ne placent pas les choses terrestres au-dessus des réalités éternelles. Ni le cachot, ni les chaînes, ni même la mort ne peuvent séparer quelqu'un de l'amour de Dieu, lui ravir sa foi et sa volonté libre. La puissance de Dieu est invincible Franz Jägerstätter (Août 1943. Dans la prison militaire de Berlin-Tegel).

    Une vie cachée de Terrence Malick est un chef-d'œuvre et d'ores et déjà un film essentiel de l'histoire du cinéma. L'action se déroule à Sankt-Radegunde (Sainte-Radegonde) dans la montagne Autrichienne, près de Linz et Salzbourg, et Berlin entre 1939 et 1943.

    Auteur des très beaux La Balade sauvage (1973), Les Moissons du ciel (1978), La Ligne rouge (1998), Le Nouveau Monde (2005), Terrence Malick avait choisi une voie esthétique souvent mal comprise dans ces derniers films: Tree of Life (2011), A la merveille (2012) ... Libre et inventif, le cinéaste s'était affranchi des règles du récit afin de travailler ses recherches esthétiques et spirituelles et de nous livrer un cinéma contemplatif, poétique, métaphysique, théologique prenant parfois la forme du psaume ou de la prière.

    Grâce à sa longue pause entre 1978 et 1998, période ou il a voyager dans plusieurs pays, penser le monde qui l'entoure, grâce à ses interrogations sur la forme au cinéma, à la force de sa réflexion philosophique, politique, spirituelle et artistique, Terrence Malick revient avec ce long-métrage à la narration classique servie par une maitrise essentielle de la mise en scène: forme, cadre, lumière, picturalité, occupation de l'espace, déroulement du temps, jeu des comédiens.

    Le film est inspiré de l'histoire réelle de Franz Jägerstätter, un paysan autrichien qui refuse de se battre aux côtés des nazis, de prêter allégeance au führer. Ils furent des exceptions, ceux qui résistèrent en Autriche et en Allemagne, à Hitler et au nazisme. Faire ce choix entrainait inexorablement la peine de mort. En Allemagne, il y eut Sophie et Hans Scholl et leurs compagnons de la Rose Blanche. En Autriche, Franz Jägerstätter, un paysan du village de Sainte-Radegonde mena un parcours exemplaire de résistance. Reconnu coupable de trahison par le régime hitlérien, il est emprisonné, condamné à mort et guillotiné le 9 août 1943. (En juin 2007, le pape Benoît XVI autorise la Congrégation pour la cause des saints à publier un décret reconnaissant Jägerstätter comme martyr. Celui-ci a été béatifié à la cathédrale de Linz).

    Une vie cachée nous conte l’histoire de cet homme héroïque et méconnu (1). Le film débute par un plan noir où l'on entend le bruissement de la nature et le chant de oiseaux (une voix off, celle de Franz dit sa foi en une vie simple et heureuse). Il est interrompu abruptement par le vrombissement d'un avion, des images en noir et blanc nous montrent celui du Führer, Adolf Hitler, survolant le pays, se rendant à Nuremberg en 1934 au congrès du parti (NSDAP(2) et des plans de la démonstration de force nazi lors de la parade (images extraites du Triomphe de la volonté, le film de propagande tourné par Leni Riefenstahl). Le mal irrémédiable est présent.

    Nous retrouvons Franz et Fani travaillant dans les champs, entourés par une nature à la beauté paradisiaque, mais nous savons que le Malin vient d'entrer en action et que cette famille va souffrir. C'est l’Anschluss, les paysans du village acceptent tous cette situation comme leur maire, leur gouvernement leur Eglise. Seul Franz, soutenu par sa famille va refuser de se soumettre. Porté par sa foi inébranlable et par son amour pour sa femme, Fani, et ses trois filles, il reste un homme libre. Malick filme le temps et les saisons, la magnificence sauvage de la nature, la majesté du travail, la beauté de l'amour conjugal, la résistance ferme et sereine de Franz, l'amour des siens et le soutien de rares habitants (le boulanger, le peintre, le curé de la paroisse très timidement), mais aussi la lâcheté et la haine des villageois qui ne comprennent pas le caractère profond et juste de son refus.



    Tous les comédiens du film sont excellents, tout particulièrement August Diehl (Franz Jägerstätter), Valérie Pachner (Franziska dite Fani, la femme de Franz) et Maria Simon (Resie, la sœur de Fani) mais aussi Tobias Moretti, le curé, Bruno Ganz, le procureur militaire lors du procès de Franz qui comprenant que cet homme a raison ne peut l'accepter, et le livre à la mort comme le fait Ponce Pilate avec Jésus.

    Terrence Malick, par l'ampleur de sa mise en scène, la rigueur absolu de ses plans, filmés au grand angle, la splendeur picturale de la lumière de son film rappelant la peinture de Millet, Friedrich, Le Caravage et Rembrandt, fait une œuvre essentielle où il prend son temps pour déployer le parcours d’un homme qui avait tout pour être heureux mais qui a choisi de résister au mal, à l'antéchrist, au diable. Un scandale pour la plupart de ceux qui le côtoient. Franz Jägerstätter, homme simple, est un saint. Une vie cachée est une pure splendeur, une ode à la création, à la beauté de la nature, une œuvre d'amour et d'épiphanie, un grand film catholique, une allégorie christique. Franz, éclairé par l'Esprit Saint et la force de son amour pour le christ a pris le chemin de la sainteté.



    Jacques Déniel



    1 Ses lettres ont été publiées Être Catholique ou Nazi de Franz Jägerstätter Éditions Bayard).

    et un film documentaire Der Fall Jägerstätter réalisé par Axel Corti (auteur de la formidable Trilogie Welcome in Vienna).

    2 Parti national-socialiste des travailleurs allemands (en allemand : Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei).

     

    Une vie cachée de Terrence Malick – États-Unis – 2019 – 2h53 – scope – couleurs

    Interprétation: August Diehl, Valérie Pachner,et Maria Simon, Tobias Moretti, Bruno Ganz, Matthias Schoenaerts....