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Le Rapace un film de José Giovanni

 Le Rapace un film de José Giovanni

Une belle et ambitieuse réussite cinématographique

 

Le Rapace passait le 9 janvier sur la chaine ARTE. C'est le premier film de José Giovanni que je vois. Sans doute la critique cinématographique des années soixante dix et suivantes et les idéologies à la mode à cette époque ne conduisaient pas à découvrir les films de ce cinéaste français. La fougue de la jeunesse, le foisonnement musical des sixties, la découverte des grands films et des grands textes littéraires était plus importante pour moi.

 

Je connais ses romans de série noire, souvent aventureux et amères. Il évoque dans trois romans noirs successifs la condition d’un homme qui fuit la police et la justice de son pays au prix de nombreux crimes et assassinats commis durant le reste de sa vie. Il a écrit une vingtaine de romans, une quinzaine de scénarios pour le cinéma (assez peu souvent pour de grands films) et réalisé une vingtaine de films.

 

Le film nous conte l'histoire d'une révolution manquée au Mexique. Vera Cruz, en 1938, un tueur à gages taiseux, dur, cynique et sans morale interprété par un Lino Ventura, sec et ombrageux, parfait dans ce rôle. Il est engagé par un groupe de révolutionnaires pour assassiner le président du pays. Un étudiant idéaliste, persuadé de l'importance de son engagement militant et pressenti pour prendre le pouvoir, l'accompagne.

 

Le sujet de la fiction laisse les spectateurs imaginer un film d'aventures comme les aimait José Giovanni aussi, très amateur du genre, dans ses romans comme dans bon nombre des œuvres auxquelles il collabora ou tourna. Le Rapace est un film tragique et désespéré, noir où la révolution échoue. Le pouvoir sera pris par un général sans pitié. Le cinéaste quitte la réalité française et tourne une sorte de néo-western psychologique au Mexique, une œuvre influencée par le cinéma américain, celui de John Huston tout particulièrement. José Giovanni prend aussi ses distances avec l’agitation révolutionnaire de mai 1968 en France et en Europe.

 

Paradoxalement, Le Rapace sortira sur les écrans français quelques jours seulement avant les événements de mai. Il contient une désillusion et un désespoir politique peu en phase avec son temps. Du point de vue cinématographique, son metteur en scène ne choisit pas de montrer des séquences d'action ou de bravoures ni les grands espaces géographiques du pays. Il se concentre sur la préparation du meurtre et sur l'affrontement verbal et physique entre le tueur à gages et le jeune révolté épris de liberté et d'amour du peuple. Il installe un huis-clos tendu où règne une ambiance de noir pessimisme très rare dans un film d’aventures. Lino Ventura, jouait souvent des personnages possédant une droiture morale, le sens des valeurs et de l'honneur (comme dans L'Armée des ombres de Jean-Pierre Melville -1969). Dans Le Rapace, il interprète un personnage complexe et déroutant, affichant un détachement et un cynisme froid face aux évènements du Monde.

 

La mise en scène sèche et crue de José Giovanni, superbement servie par les lumières chaudes et les cadres ciselés de Pierre Petit, son chef-opérateur, par l'excellente musique de François de Roubaix et par les chansons de Los Incas font du second long-métrage de José Giovanni, une belle et ambitieuse réussite cinématographique que confirmera, le cinéaste, deux ans plus tard, en tournant son plus beau film, son chef-d’œuvre: Dernier domicile connu.

Jacques Déniel

Le Rapace un film de José Giovanni
France -Italie-Mexique – 1968 – 1h47 – V.F.

Interprétation: Lino Ventura, Rosa Furman, Aurora Clavel, Augusto Benedico, Carlos Lopez Figueroa....

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