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Tár un film de Todd Field

Tár un film de Todd Field

 

Depuis quelques jours, Tár est le film dont on parle, celui devant lequel de nombreux critiques cinématographiques ébahies se prosternent.

 

Cate Blanchett est Lydia Tár, une des plus célèbres et grandissimes chef d’orchestre au monde, détentrice de tous les grands prix prestigieux. Le film débute par une discussion d’un haut niveau intellectuel où la maestro démontre ses connaissances, son génie musical et intellectuel ainsi que sa pertinence d'analyse.

 

Cette habile introduction du personnage donne le ton du film. Nous sommes devant une fiction où tous les éléments sont des postulats. Un chef d'orchestre brillant, une femme intelligente, belle, impérieuse, lesbienne et père d'une petite fille avec une violoniste, une femme qui dirige tous les êtres qu'elle rencontre et qui très vite apparait comme une pure création du cinéaste Todd Field. Un être conceptuel et fictif, dénué de sentiments humains réels.

 

La mise en scène au cordeau, froide, lisse et acérée est particulièrement rude dans une belle séquence drôle et crue se déroulant dans l’amphithéâtre d'une grande école de musique new-yorkaise, The Julliard School, où professeur invitée, Lydia Tár remet en place de fort belle manière un étudiant. Avec une intelligence redoutable et un sens inné de la répartie, elle cloue le bec au jeune élève insolent qui affirme haut et fort la grandeur de sa bêtise identitaire, genrée et totalitaire. Critiquant la musique de Jean Sébastien Bach, qu'il méprise pour sa supposée misogynie il fustige les compositeurs blancs, cisgenres, hétérosexuels. L’élève, perclus de certitudes, reçoit de la part de sa professeur une leçon de vie conclue par une réplique assassine - les architectes de vôtre âme semblent être les réseaux sociaux -, avant de quitter la salle de cours en balançant Vous êtes une vraie salope à sa professeur certes dure mais vive, supérieure et passionnée.

 

Malheureusement, cette scène succulente de quelques minutes est aussi un postulat idéologique qui va permettre à l'auteur du film de passer de l'hagiographie à un récit critique bien-pensant de son héroïne trop intellectuelle, dominatrice et créative. Elle va très vite se retrouvée accusée – peut-être à juste titre – d'être une manipulatrice, de favoriser des élèves filles en échange de faveurs sexuelles. Elle paie ainsi l'intransigeance de son caractère, son intelligence et son génie..

 

La virtuosité roide et la prétention de la mise en scène de Todd Field sont gratuites, vides et servent à imposer son univers scénaristique régi par des règles sociales, culturelles et politiques. Seuls, les acteurs et actrices sont excellents, et, surtout le jeu implacable, brillant, démesuré peut-être de Cate Blanchett, est d’une ampleur conséquente. Malgré ce talent, le personnage va se perdre, noyée par la dérive fantastique, absconse et ridicule de la dernière demi-heure et le final incroyablement sot et absurde qui clôt le film.

 

Jacques Déniel

 

Tár un film de Todd Field – Etats-Unis – 2022 – 2h38 - V.O.S.T.F.

Interprétation: Cate Blanchett, Noémie Merlant, Nina Hoss, Sophie Kauer, Julian Glover, Mark Strong... sortie en salles de cinéma le 25 janvier.

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