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Brigitte Bardot (1934 – 1991) une étoile libre, éternellement française

Brigitte Bardot (1934 – 1991)

une étoile libre, éternellement française



L’apparition : naissance d’un mythe

Avant d’être un mythe, Brigitte Bardot fut une apparition. Une évidence fulgurante qui, dès ses débuts, déplaça les lignes du cinéma français. Elle surgit au milieu des années cinquante avec Et Dieu… créa la femme de Roger Vadim (1956), film-manifeste qui révèle une femme libre, instinctive, impossible à contenir. Le scandale est immense, la fascination immédiate. Bardot ne joue pas : elle existe, et cette existence même bouleverse l’écran. Elle poursuit ce chemin singulier avec La Femme et le Pantin de Julien Duvivier (1958), où son corps et son regard deviennent déjà des enjeux dramatiques, avant de surprendre profondément dans La Vérité de Henri-Georges Clouzot (1960). Film où elle impose une intensité grave, presque douloureuse, loin de toute frivolité, révélant une actrice capable de silence, de tension, de vertige intérieur. Avec Vie privée de Louis Malle (1962) puis Le Repos du guerrier de Roger Vadim (1962), Bardot explore la violence du désir, l’usure de l’amour, l’ennui comme horizon. Ces films fondateurs tracent déjà le portrait d’une femme en fuite, trop vivante pour les rôles qu’on voudrait lui assigner. Le mythe est en marche, mais la liberté, elle, est déjà là.

Une liberté incarnée

Brigitte Bardot, c’est la liberté incarnée, solaire, dérangeante pour certains, mais toujours assumée. Une femme qui n’a jamais vraiment joué à être une star : elle l’était, simplement, parce qu’elle échappait aux cadres, aux règles. Française avant tout, jusque dans ses silences, ses excès, son accent, sa manière d’aimer et de rompre. Bardot n’a jamais cherché à plaire au monde ; le monde s’est organisé autour d’elle. Son cinéma est à son image : sensuel, insolent, vivant. Des films populaires aux œuvres plus exigeantes, elle traverse les années cinquante et soixante comme une évidence, imposant un nouveau regard sur la femme à l’écran. Elle n’est ni muse docile ni ingénue décorative. Elle regarde, elle choisit, elle s’ennuie parfois — et cet ennui devient une force.

Le Mépris : Vérité à nu, le mythe devient éternel

Et puis il y a Le Mépris (1963), l’un des plus beaux films français de l’histoire du cinéma. Un chef-d’œuvre de Jean-Luc Godard, froid et brûlant à la fois. Bardot y est sublime, mais surtout juste. Son corps, que la production voulait exposer, devient sous la caméra de Godard un territoire fragile, presque tragique. Face à Michel Piccoli, elle incarne le désamour qui s’installe, l’incompréhension qui ronge, la distance qui ne se comble plus. Chaque regard compte. Chaque silence pèse. Bardot ne joue pas la rupture : elle la vit, à l’écran, avec une modernité saisissante.



Dans Le Mépris, elle cesse d’être un mythe pour devenir une femme — et c’est précisément là que le mythe devient éternel. Bardot y touche à quelque chose de rare : la vérité nue, sans effet, sans posture. Un moment de cinéma pur, suspendu, qui continue de nous regarder, des décennies plus tard.

Le combat des animaux : une forme de courage

Bien loin d’être une icône figée dans l’histoire du cinéma, Brigitte Bardot avait choisi un combat, plus silencieux et plus radical : celui des animaux. En se retirant des plateaux, elle n’a pas disparu du monde, elle a déplacé sa colère et sa tendresse. La défense des plus faibles est devenue son langage. Contre la cruauté, l’indifférence, l’hypocrisie, elle s’est dressée sans calcul, sans nuance, mais toujours avec une sincérité brute. Les animaux furent son refuge et sa cause, peut-être parce qu’ils ne trahissent pas, ne jugent pas, n’exigent pas de masque. À travers eux, Bardot a poursuivi sa quête de liberté, loin des projecteurs, mais au cœur du réel.

La disparition d’une époque

Et puis, ce dimanche 28 décembre, Brigitte Bardot s’est éteinte à l’âge de 91 ans. Avec elle disparaît bien plus qu’une actrice : une époque, une vibration, une manière d’être au monde. Sa mort referme un chapitre essentiel du cinéma français et de l’imaginaire collectif. Elle laisse derrière elle des films, des images, des silences inoubliables — et cette présence unique qui traversait l’écran comme une évidence. Bardot n’a jamais vieilli dans le regard du public : elle demeure cette femme libre, insaisissable, qui a refusé les compromis jusqu’au bout.

Éternellement française

Enfin, il serait impossible de parler de Brigitte Bardot sans évoquer son amour viscéral de la Nation française. Un amour frontal, parfois rugueux, mais profondément enraciné. Elle aimait la France comme on aime un paysage, une langue, une mémoire. Sans détour, sans prudence, fidèle à elle-même. Bardot aura vécu et parlé en Française libre, attachée à son pays comme à une part d’elle-même. Et c’est sans doute ainsi qu’elle restera : une figure indocile, passionnée, éternellement française.

Jacques Déniel

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